Some peoples just need a high five. ➸ Zack

Cela faisait à peine quelques jours que Zack était arrivé à Santa Barbara, et bien qu’il connaissait déjà la ville pour y être venu plusieurs fois, les habitants lui étaient encore inconnus. En compte, il n’était pas venu pour se faire connaître des résidents, mais retrouver sa sœur, et c’était la partie la plus compliquée. Il avait bien entendu retrouvé sa belle-sœur, Emilia, avec qui il n’avait jamais cessé de correspondre. C’était sûrement pour cela qu’il avait répondu à un message venant de cette dernière au beau milieu de la nuit. Il ne dormait plus beaucoup ces temps-ci, alors cela lui était égal, mais il soupira longuement en lisant le SMS lui disant de venir la retrouver ou chercher à une adresse, ce n’était pas très clair et autant dire qu’il ne savait pas si c’était à cause du correcteur automatique ou du taux d’alcoolémie de la jeune femme qui rendait ça incompréhensible.

Il s’extirpa alors du fauteuil où il se trouvait à l’extérieur, sur sa terrasse. Il posa, ou plutôt, jeta le dossier qu’il tenait en main et parti alors enfiler un T-shirt, noir ça ira, et un jean. C’était ça le plus agréable quand il n’était pas au travail, il n’avait pas besoin d’être en costume tout le temps, même s’il avait fini par apprécier la veste taillée avec le temps. Ses clefs de voiture en mains, il prit rapidement le volant et rentra alors l’adresse en question dans le GPS. Sur le trajet, il eut le temps de réfléchir au pourquoi du message d’Emilia, est-ce que ça lui était vraiment destiné ? Bonne question… Qui prenait une tournure encore plus conséquente lorsqu’il se gara devant le lieu en question. La musique ne trompait pas, et même s’il avait un doute, les rires et les cris le mettaient sur la voie. Un rire nerveux sortit de sa bouche quand il sortit de son véhicule pour s’approcher alors de la maison, tentant d’appeler une énième fois Emilia, en vain. "You're kiddin' me."

Non sans surprise, il rentra sans aucun problème au cœur de la soirée qui battait son plein. Il parcourait les pièces des yeux, tentant de repérer la touffe blonde de sa belle-sœur, mais plus il avançait et évitait de percuter quelconque personne, il se disait qu’elle était déjà loin. Le brun ne put s’empêcher de revoir ses années fac et les soirées qu’il avait pu animer avec ses potes de promo’, du moins, celles dont il se souvenait. Le psychologue qu’il était se retenait d’analyser les visages environnants. Il regardait furtivement son téléphone et l’heure, puis décidait alors de continuer à inspecter les pièces une par une, bordel, il était devenu le gars plus vieux qui venait chercher quelqu’un de trop bourré pour rentrer. À quel moment il était devenu le plus vieux, sérieux ? Non, il ne l’était pas, c’était impossible et puis malgré tout ce que les gens présents remarquaient ce n’était pas son âge, mais l’absence d’alcool dans sa main, sur son T-shirt et dans son sang. Au fond de lui, il se demandait sérieusement ce qu’il foutait là, mais il tentait de se concentrer un minimum.

Alors qu’il poussait quelques portes çà et là, il s’enfonça un peu plus dans la maison et arriva à un endroit plus calme, et à sa grande surprise, pratiquement vide. Il tenta une nouvelle fois de composer le numéro d’Emilia, tout en marchant, mais il fut alors interrompu par une voix féminine :

« Tu t’es perdu ? »

Il leva alors les yeux vers la silhouette qui se tenait devant lui et regarda autour de lui.

« Ça se voit tant que ça ? »

Évidemment que ça se voyait, il affichait un air beaucoup trop sérieux pour être dans la pleine ambiance de cette soirée.

« C'est qui qui t'a invité ? »

Il esquissa un sourire et glissa alors son téléphone après l’avoir désigné.

« Je suis venue récupérer quelqu’un, mais visiblement, elle est déjà partie. »

Il se rapprocha alors doucement et examina le visage de la brune devant lui.

« J’imagine que c’est chez toi si tu poses la question. Je ne resterai pas longtemps, t’en fais pas. Tu n'aurais pas vu une jeune blonde probablement déjà saoule avec une cigarette à la bouche et un air à détester tout le monde par hasard ? »

Cette question était surtout preuve de sa perte de patience, mais il n'émettait pas beaucoup d'espoir quant à la réponse. La brune avait sûrement d'autres choses à faire.

Zack était presque rassuré d’être tombé sur l’organisatrice de la soirée, au moins, il pouvait espérer qu’elle sache où il allait commencer ses recherches. Il n’avait pas vraiment envie de rester là où il n’était pas invité et jouer les troubles fêtes auprès des participants, il était presque devenu responsable, à croire.

« Ne t'en fais pas, ce n'est pas si grand que ça. Tout va bien aller ! »

Il esquissa un sourire en secouant légèrement sa tête. Un sourire, c’était la seule chose un tant soit peu joviale dont il était capable depuis quelques semaines. Au moins, il avait trouvé quelqu’un de sympathique du premier coup. Alors qu’il s’appliqua à donner une description sommaire de sa belle-sœur, il regardait la brune face à lui. Elle semblait y réfléchir et cela lui donnait un minimum d’espoir avant qu’il ne doive repartir comme il était venu.

« Il y a plein de personnes qui me viennent en tête... Bloom, Luna, Sydney, Haley... »

Les sourcils de Zack s’étaient haussé presque automatiquement à l’énumération des prénoms, un à un. Il pinça légèrement les lèvres et soupira brièvement.

« J’aurais dû m’en douter. »

Il glissa ses mains dans les poches de son jean en fixant son interlocutrice, il ne la voyait pas vraiment avec le peu de lumière qu’il y avait, mais elle avait l’air jeune, comme la plupart des personnes dans cette maison à ce moment-là, il devait avoir fait haussé la moyenne d’âge à lui tout seul en passant la porte.

« Tu veux venir la chercher à l'intérieur ? »

Après tout, c’était une idée oui, mais bonne ou non il ne le déterminait pas encore…

« Pourquoi pas, je te suis. »

Il avait parlé avant même d’avoir terminé sa réflexion, à croire que ses souvenirs de fac l’avaient poussé à replonger par curiosité au cœur d’une fête. Zack était quelqu’un de spontané ce n’était pas nouveau, mais il aurait habituellement repris le chemin du retour. À peine le temps de poursuivre ce fil de pensée qu’il se décala pour laisser la jeune brune passer devant lui, faisant un léger signe de main pour lui annoncer la voie.

« Après toi. » annonça-t-il

Suivre une inconnue, dans un lieu inconnu, au milieu d’une ville quasi-inconnu, c’était un début de nuit assez inhabituel.

Zack aurait pu hésiter plusieurs secondes, mais il ne lui en fallut à peine trois pour lâcher sans vraiment d’entrain le prénom de son ex-belle-sœur :

« Emilia. Et je commence à me dire qu’elle a déjà mis les voiles la connaissant. »

Il leva légèrement les yeux au ciel en secouant brièvement la tête. Depuis la mort de sa sœur, le brun avait un peu perdu de vue celle qui était la femme de Zoey. Non pas qu’il ne l’appréciait pas, mais il ne pouvait cacher le fait qu’il désapprouvait totalement ses agissements qui d’ailleurs s’étaient accentués depuis le décès de Zoo’. La fusillade après tout, faisait suite aux choix d’Emilia. De la rancœur oui, mais s'il était là ce soir-là, c’était probablement parce qu’il avait espéré qu’elle se décide à accepter son aide ou du moins choisir une voie plus raisonnable. Tous ces faux espoirs avaient été balayés à cet instant, où il avait vu l’endroit qu’elle lui avait indiqué et maintenant qu’il réalisait qu’elle était sûrement partie.

« Moi, c'est Pearl en fait ! »

Zack chassa le fil de ses pensées et revint dans le moment présent avec la jeune brune. Il lui adressa un sourire et tendit alors la main vers elle.

« Zack. Enchanté. »

Le brun n’avait aucune idée de l’identité de Pearl, à vrai dire, il n’avait pas écouté de musique depuis bien trop longtemps alors qu’il aimait ça. D’habitude, cela l’aidait même à se concentrer, mais depuis quelques mois ce n’était plus au goût du jour. Il ne réalisait donc pas que depuis qu’il était rentré dans cette maison, il avait déjà dû entendre plusieurs morceaux du groupe de la brunette, mais, en toute innocence, il ne les connaissait pas.

Zack prit soin de donner le pas à Pearl, voulant la prendre pour guide dans cette soirée.

« Mais quel gentleman ! »
« A votre service. »

Avait-il ajouté sans l’ombre d’une hésitation. Il avait bien décelé l’humour dans cette remarque et, sa nature le voulant, il avait volontiers poursuivi le jeu. Enclenchant le pas derrière la brune, il ressenti un léger frisson dans sa nuque. La silhouette face à lui avait été transportée le temps d’un flash de quelques centièmes de secondes dans ce qui semblait être une autre décennie. Les murs avaient même pris des couleurs dignes des années 70. Zack passa rapidement ses doigts sur ses yeux qui commençaient à s’irriter. Il aurait juré voir une vieille montre Jaeger-Lecoultre à son poignet avant de redresser la tête et de voir la porte s’ouvrir sur le cœur de la fête. Tout était redevenu normal, s’il pouvait dire. Il fronça les sourcils en sentant que son pouls avait fait une montée anormale. Il regarda à nouveau son poignet, où trônaient son habituelle montre ainsi que son jonc en argent. Ce ‘flash’ était-il réel ou était-il encore le fruit de son esprit fatigué ? Après tout, ces temps-ci, c’était récurrent les rêves et sensations de déjà-vu, alors il inspira et reporta son attention sur le présent.

Le jeune Rosewood suivi de près la jeune femme avant de se stopper quand elle se retournait vers lui pour lui poser plusieurs questions. Il se redressa légèrement, effaçant le trouble de son visage et se concentra sur ses lèvres pour être sûr de tout comprendre à travers les décibels ambiants.

« Tu ne sais pas si elle connaît quelqu'un ici ? Avec qui elle a l'habitude de trainer ? »
« Aucune idée. Je viens de débarquer ici pour tout dire donc… »

Il avait également haussé la voix, imitant son interlocutrice au passage. S’apprêtant à poursuivre sa phrase tout en observant autour de lui, il stoppa son regard sur l’un des murs de la pièce, au-dessus de la tête d’un groupe de jeunes riant aux éclats. Trônant fièrement dans un cadre noir, un disque de diamant d’un groupe : Leroy B. and the Vines, et figurant au centre de celui-ci, au milieu d’autres membres dudit groupe, la jeune brune avec qui Zack était depuis son arrivée. Son sourcil s’arqua presque aussitôt et son regard revint se loger dans celui de Pearl, un léger sourire au coin de ses lèvres.

« Et elle ne comptait pas dire qu’elle était une star. »

Zack rit légèrement et se trouvait assez bête d’ailleurs de ne pas connaître ce groupe qui était pourtant détenteur d’une des meilleures récompenses musicales.

« C’est bien toi, non ? »

Il pointa alors le cadre en question, conservant son sourire, surprit, mais agréablement. Il haussa alors une épaule.

« Et maintenant... J’espère que je n’ai pas l’air trop stupide à ne pas connaître votre musique. »

« Ça serait con qu'elle soit déjà partie, tu aurais fait le déplacement pour rien. C'est elle qui t'a dit de venir ? Si elle s'est cassée, c'est culotté de sa part. »

Zack eut un léger rire. Con, ouai, mais elle en serait complètement capable. Il en venait à se demander pourquoi il était venu au final. À vouloir aider tout le monde depuis quelques mois, il allait s’y perdre.

« Plus rien ne me surprend venant d’elle. Je me demande pourquoi je m’obstine à vouloir l’aider. »

C’était sorti naturellement, dans le plus grand des calmes dont il était capable. Il leva légèrement les yeux au ciel en réalisant qu’il vouait plus de rancœur envers son ex belle-sœur qu’autre chose. Il secoua brièvement la tête, s’efforçant de suivre la jeune brune qui s’enfonçait dans la foule.

« Tu viens de débarquer ici ? À Santa Barbara ? »
« C’est ça. Je connais un peu la ville, mais… pas à ce point. »

Zack eut un faible sourire avant de se redresser et de croiser le fameux disque de diamant au mur. Alors qu’il le faisait remarquer à Pearl, il observa sa réaction qu’il trouva assez... curieuse mais attendrissante en soi. Elle semblait à la fois gênée, mais cela se voyait qu’elle aimait ce qu’elle faisait. Le brun était tout bonnement en pleine analyse comportementale au beau milieu d’une fête. Il releva les yeux vers les siens quand elle termina sa phrase, se rendant compte qu’il était en train de la fixer, concentré. Son travail devenait un peu trop présent il semblerait.

« Eh bien… Je ne te garantis pas de retenir le nom, mais j’écouterais avec plaisir. Je me contenterai de me la péter en racontant que j’ai passé un moment avec la chanteuse du groupe. »

Il fit automatiquement un clin d’œil suivi d’un léger rire avant de se redresser légèrement.

« Tout est relatif, certes. Et même si l’humilité est belle, ne te rabaisse pas pour autant, j’ai des preuves. »

Il pointa à nouveau le disque de diamant sur le mur en souriant. Ses mains se glissèrent alors dans ses poches suivies d’un long soupire. Il regarda un instant les individus autour de lui, retrouver Emilia était peine perdue et honnêtement, il n’en avait plus envie. Sûrement l’effervescence de la fête qui avait eu raison de ses recherches. Il regarda à nouveau la jeune femme :

« Tu sais quoi… Laisse-tomber, je ne la retrouverai pas. Et je ne vais pas te gâcher la soirée avec ça... Tu dois avoir mieux à faire.  »

Jouer les trouble-fête, ce n’était pas son genre, bien au contraire. D’habitude, c’était lui l’un des premiers à être sur les devants d’une soirée, mais les derniers événements lui avaient trop occupé l’esprit, à croire.

Un sourire suivit celui de la brune lorsqu’elle évoqua le destin. Zack, lui, n’y croyait pas vraiment. Il était partisan du libre-arbitre, préférant se convaincre qu’il pouvait gérer ce qu’il se passait, bien qu’en ce moment, tout ce qu’il gérait, c’était son taux de caféine. Et honnêtement, si le destin avait fait qu’il rate quelques heures de sommeil pour venir chercher son ex-belle-sœur dans un élan de dernière gentillesse, pour se faire planter ensuite… Il aurait bien plusieurs choses à lui dire, à ce ‘destin’.

Le brun esquissa ensuite un faible sourire. Il aimait S.B., il aimait y venir, avant. Mais, maintenant, c’était différent. Depuis qu’il y avait posé les pieds dans le but de retrouver sa sœur, il sentait que quelque chose était différent. Il n’arrivait sans doute pas à décrocher du boulot puisqu’il en rêvait, mais il ne se doutait pas que c’était bien plus important que ça, et beaucoup plus dérangeant aussi. L’ambiance de la ville pour lui n’était plus la même. Il se contenta cependant de hocher la tête et de hausser une épaule.

« Nous verrons, je ne suis pas un homme facile. »

Un peu d’humour pour cacher tout ça, c’était parfait.

Lorsqu’il apprit l’existence du groupe et donc de la chanteuse que Pearl était, Zack se contenta de rester lui-même. C’était sans doute une de ses plus grandes qualités de considérer l’humain comme tel. Faisant fi des choses comme la célébrité ou la réputation. Il aimait avoir son propre avis, et rien ne plaçait qui ou quoi que ce soit au-dessus de quelqu’un d’autre. C’était sûrement pour ça qu’il aimait autant l’esprit et son étude, ou qu’il était si doué dans ce qu’il faisait. Concrètement, dit comme ça, ça faisait psychopathe mais c’était tout le contraire. Ses collègues n’arrivaient pas à comprendre comment il pouvait s’asseoir des heures dans une pièce en face d’un tueur et de discuter… Ou plutôt, les faire parler sans l’once d’une retenue. Ses rapports étaient toujours si extrêmement précis et détaillés que certains lecteurs étaient à deux doigts de se poser des questions sur le psychologue qui les avait écrits, mais en y pensant bien, c’était au final une mine d’informations incomparable.

Il avait beau être ainsi dans le monde professionnel, il était assez différent en-dehors de ça. Zack n’était pas quelqu’un de trop sérieux, barbant, lançant des analyses pompeuses à la tête des gens qui l’entouraient, non. Il était lui, simplement, et même si ces derniers temps, il avait l’impression de s’être un peu perdu, il continuait à être, il aimait le penser, quelqu’un de bien. Ou du moins, qu'il arrivait à garder l'illusion que tout allait bien.

« J’imagine. Il y a de quoi être fière. »

Passant outre le fait qu’en entendant le ‘beaucoup de fans’ ça le rendait encore plus ridicule puisqu’il ne les connaissait pas, il se contenta de sourire en regardant la jeune femme. Elle était sans doute plus jeune que lui, et il ne pouvait qu’admirer d’avoir créé tout ça en moins de temps que lui sur Terre. Il se décala légèrement pour laisser passer un petit groupe de personnes derrière lui avant de retourner son regard vers Pearl. Il pencha légèrement la tête et eu un sourire en coin à sa remarque. Elle n’avait pas tort, même si elle fumait sans nul doute un joint, mais elle avait raison : c’était légal en Californie. Mais il ne rebondit pas sur cette partie, il n'était pas flic, même si il bossait avec eux.

« Qui a dit que j’avais un esprit clair…? »

Il haussa un sourcil puis eut un léger rire avant de lever les yeux au-dessus des épaules de la brune.

« Je sais pertinemment que c’est ta fête alors je vais faire semblant et aller dans la politesse pour te demander si tu veux boire quelque chose, tout en restant dans le légal, bien évidemment. »

Elle avait sans doute déjà bu tout ce qu’elle voulait, mais, pour Zack, c’était assez naturel et être là-bas le rendait presque nostalgique. Il passait un agréable moment, alors pourquoi ne pas le prolonger.

Un simple et léger haussement d’épaule en regardant Pearl, suffit en guise de réponse. Zack n’était jamais persuadé de rien lorsqu’il s’agissait d’autre chose que du concret et du palpable, alors le destin… Ou bien le ‘surnaturel’ enveloppant une ville ou encore moins les réincarnations. Lui était du genre à penser que s’il se sentait « étrange » à Santa Barbara, c’était à cause des événements, de son boulot, ou même de ce qu’il avait bu ou manger la veille. S’il savait ce qui s’apprêtait à lui tomber dessus.

Un sourire toujours en coin et un sourcil relevé, Zack leva légèrement le menton, prenant un faux air fier à la remarque de la brune.

« Ah oui ? Je pourrais me vexer... Je n’ai pourtant jamais brisé plus d’un cœur à la fois. »

Lancé pour lancé, Zack continuait sur le ton de l’humour, bien évidemment. Il n’allait pas nier qu’il avait… Profité de ses années d’études en bonnes compagnies, mais en le connaissant bien, il n’était pas, ou plus, du genre à collectionner les conquêtes. À vrai dire, depuis qu’il travaillait, il avait même tendance à oublier toute cette partie de sa vie. Sa carrière avait pris le dessus malgré lui et il ne se leurrait pas, c’était compliqué pour lui de trouver le temps de se rappeler qu’il y avait autre chose que le boulot, alors une relation...

Le brun jeta un œil du côté d’un groupe de jeunes tentant de communiquer aussi bien qu’ils le pouvaient dans leur état et il grimaça légèrement.

« Oui, sur ce point, tu as raison. » ponctua-t-il avec un sourire.

Il tinta la tête sur le côté à la réponse de Pearl. Elle avait raison, encore une fois, mais c’était évident. C’était chez elle que ça se déroulait, alors, oui, elle savait ce qu’il y avait à boire. Simplement, il n’allait pas empêcher son élan éternel de gentillesse. Il plissa légèrement les yeux aux derniers mots de la jeune femme, soudainement beaucoup plus intéressé, un peu comme si on venait de promettre du rhum à Sparrow.

« Tu viens de piquer ma curiosité à un point sensible, là. »

Il parcourut rapidement la salle des yeux avant de se concentrer à nouveau sur la chanteuse, en souriant.

« Et comme c’est si gentiment proposé… »

Il se redressa alors, prêt à suivre le mouvement. Oui, Zack était le genre de personne qui se serait volontiers damné pour un vin ou tout autre alcool de cave. Appelez-le vieux jeu, si vous voulez, mais c’était le cas.

« Encore une fois, je te suis. »

« Ce n'est pas bien, il ne faut pas briser les cœurs. »

Les yeux de Zack suivaient le doigt inquisiteur, qui ne l’était probablement pas vraiment, de la jeune brune. Et quand il les releva vers les siens quand elle eut fini sa phrase, un sourire apparu sur son visage, un rictus plus qu’un sourire d’ailleurs, un rictus qui ne semblait même pas être le sien. Il eut la sensation soudaine d’être dans la lune, de ‘zone out’ un instant. Les paroles de Pearl continuaient et il semblait ne pas vouloir en perdre une miette, toujours le regard fixe, assez sombre d’ailleurs. Il détaillait les lèvres de la jeune femme alors qu’elles se mouvaient et il souffla alors, d’un air presque défiant ces dites rancunières dont elle parlait :

« Je retiendrai le conseil. »

Cela ne prit que quelques secondes pour qu’il cligne enfin les paupières et se redresse, légèrement hébété. Ce n’était pas dans son habitude de réagir ainsi, il regarda le sol un instant, vérifiant même s’il était toujours au même endroit. Il s’était avancé de quelques centimètres vers la chanteuse sans même s’en rendre compte. Il inspira avant de déglutir, la gorge sèche. Ses sourcils se froncèrent doucement, analysant ce qu’il venait de dire, ce qu’il venait de se passer. Décidément, la fatigue de ces derniers temps semblait se manifester de plus en plus, pensa-t-il, innocemment.

Effaçant alors quelconque malentendu, il reprit son sourire de façade, celui qu’on lui connaissait bien. Se ressaisissant, il glissa ses mains dans les poches arrière de son jean. L’idée de Pearl lui plaisait et l’amusait aussi, il n’allait pas le cacher. En même temps, quand on lui proposait d’attaquer une bouteille de réserve, fallait s’y attendre. Il emboîta alors aussitôt le pas derrière elle, évitant les quelques bousculades de la foule. Laissant sa main glisser contre le mur en descendant les marches, Zack haussa les sourcils de surprise en découvrant l’endroit.

« Eh bien, eh bien… J’ai l’impression d’être de retour chez mes parents. »

Rosewood père ayant sa propre cave également, le brun avait descendu des Châteaux Margaux en cachette au plus grand déplaisir de son paternel. Il reconnut quelques étiquettes parmi toutes celles qu’il voyait puis il tourna la tête au tintement des verres que prenait Pearl.

« Pas besoin de me dire le prix, j’ai mon idée. »

Il lui sourit, d’un côté, il était plutôt content que personne ne sache d’où il venait, il avait voulu ça toute sa vie : effacer toute trace de richesse et de bourgeoisie de son existence. Il saisit alors le verre qu’elle lui tendait et ajouta simplement :

« Et je me sens privilégié, il n’y a pas de doute. »

Un échange de regard, et il leva légèrement son verre vers la brune, en guise de cheers, puis il observa le liquide ambré dans son verre. L’alcool n'était peut-être pas ce qui lui fallait ces temps-ci, mais, honnêtement, là, il n’en avait rien à faire. Il porta le verre à ses lèvres et réagit à sa précision avant de boire :

« Il faudra rajouter la catégorie ‘inconnu intrusif trop curieux’ alors. »

Alors qu’il goûtait au whisky, il pencha la tête en guise d’approbation, évidemment, c’était une bouteille excellente. Il eut presque une pensée pour son père, mais il ne fallait pas exagérer, presque. Il haussa alors une épaule en pinçant les lèvres face à la brune avec un simple « Meh. » faussement déçu avant de rire légèrement.

« Non, je plaisante, il est excellent. Je te remercie. »

Il but alors une autre gorgée, évitant de finir son verre d’une traite, ce n’était pas l’envie qui lui manquait, avant d’inspecter la pièce, avançant au hasard. Il finit par se stopper, en regardant les bouteilles.

« Vous êtes combien à vivre ici ? Le groupe, ou… plus ? »

Il tourna la tête vers elle, son verre calé contre son torse.

Il ne fallait pas être expert en quoi que ce soit pour affirmer que Pearl était une jolie femme, et Zack ne dérogeait pas à la règle, il était certainement plus content d’être tombé sur elle que de devoir passer la soirée à fouiller la maison avant de rentrer avec un corps semi-alcoolisé dans les bras, ou les mains vides. Les traits fins, de longs cheveux bruns, des yeux espiègles… Cela n’avait pas échappé non plus à l’autre qui la voyait à travers les yeux du psychologue, elle cochait toutes les cases de ses critères. C’était sûrement pour ça qu’il avait saisi l’opportunité pour prendre les devants un instant, profitant de l’état dans lequel était le brun depuis son arrivée, merci Santa Barbara pour cette occasion, même si ce dernier ne comptait pas le laisser faire. L’entente de son prénom l’aida d’autant plus à se tirer de sa légère dissociation. Alors qu’il se redressait, il n’osa pas regarder Pearl à nouveau tout de suite.

« Oui… Ça va, t’inquiètes pas. »

Reprenant contenance, il ajouta alors, dédramatisant la chose, se voulant rassurant, parce que lui pensait avoir la bonne explication.

« Oh ça, non, c’est la fatigue. J’imagine que le café après minuit n’est pas une bonne idée. Depuis que j’ai déménagé ici, je bosse pas mal, alors sûrement du surmenage. »

Bah, voyons. Enfin, c’était de l’auto-conviction pour se dire qu’il ne devenait pas complètement fou. Il tenta alors de laisser cet instant derrière eux, et s’appliqua à suivre la jeune brune jusqu’au sous-sol. Quand il se permit d’évoquer ses parents, il ne put s’empêcher de rire à la question qu’elle lui posait.

« Eh… En vrai, j’aurais bien aimé ! »

Il eut un mouvement de tête appuyant ses dires, avant de secouer la tête :

« Mais non, c’était beaucoup plus ennuyeux que ça. »

Le brun prit sa boisson avec plaisir et offrit un sourire à Pearl pour sa correction. Il resta un instant à la regarder avant de prendre lui aussi une gorgée, et de s’offrir une micro-visite curieuse des lieux. Il sirota silencieusement son whisky en écoutant attentivement. Il se tourna vers elle, le nez encore dans son verre.

« Ce n’est pas trop chiant de n’être jamais seule ? »

Il releva son coude et termina son verre, un peu trop vite peut-être, mais c’était bon, assez de self réprimandes pour la soirée. Pour une fois qu’il pensait à autre chose. Il appuya son dos contre l’un des meubles présents, veillant à ne rien renverser, laissant son verre vide appuyé contre sa jambe.

« Enfin, j’imagine que si ça ne te plairait pas, tu ne serais pas là… et moi non plus. »

Il sourit en guise d’évidence à sa remarque, ses yeux reprenaient leur analyse habituelle des réactions de la jeune femme face à lui.

Rosewood n’était pas vraiment du genre à s’épancher sur lui-même bien longtemps, alors quand Pearl lui demanda s’il allait, il avait balayé la question d’une composition légère en disant que de toute façon, il manquait de sommeil, mais ça, c’était évident. Il manquait de sommeil depuis sa naissance (selon lui), et en manquerait toute sa vie, mais au fond ça lui était un peu égal vu qu’il était du genre à sacrifier la moindre heure de sommeil pour tout et n’importe quoi. C’était plus dérangeant pour la personne chez qui il décidait d’aller sonner à 7h00 un dimanche matin avec rien d’autre que son sourire et la promesse de pancakes maison. Peu importe, Zack eut un léger sourire alors qu’il secouait la tête en guise de refus à la proposition de la brune.

« Non merci, il vaut mieux pour toi comme pour moi que je garde un semblant d’idées clair. »

En y réfléchissant, il n’avait pas fumé depuis la fac et encore, ça avait été rare. Autant, il n’avait jamais dit non à un verre, autant, il avait presque toujours refusé clopes et autres joints. Il avait plus confiance dans le liquide que dans le gazeux, et puis comme ça, il pouvait garder une longueur d’avance en sprint. Ça lui avait servi plusieurs fois pour ne pas se faire prendre et laisser ses frères de campus ramasser pour leurs sales coups.

Zack afficha un faux air triste quand il sentit la main de la jeune femme dans son dos.

« Merci. J’en souffre quotidiennement. »

Il ne resta pas longtemps sérieux, ce n’était pas le moment pour, de toute façon. Et puis il n’allait pas parler de son enfance, il n’aurait pas grand-chose à dire, il la trouvait ennuyeuse. En revanche, quand Pearl se mit à parler d’elle, sa mine intéressée n’avait pas tardé à pointer le bout de son nez. Effectivement, il comprenait mieux qu’elle soit habituée à la présence des autres, et il ne la trouvait que plus intéressante... et aussi parce que les gens aussi sociables le fascinaient lui et sa passion pour les moments solo. Clairement, s’il n’avait pas un instant (plusieurs mêmes) pour se décharger quelque temps des autres, il pouvait devenir dingue, grincheux, et purement impatient.

Le brun reprit le fil de parole de Pearl quand il l’entendit poursuivre et sourit quand elle mentionna les rencontres. Il hocha la tête :

« Je ne vais pas dire le contraire. »

Il répondit à son sourire en croisant son regard pendant quelques secondes. Il ne s’empêcha pas, une nouvelle fois, la réflexion qu’elle avait des yeux captivants et se redressa sur ses deux pieds pour se rapprocher d’elle. Il prit la bouteille qu’elle avait posée plus tôt pour remplir le verre de la jeune femme, même s’il n’était pas vide, et le sien. Zack releva son whisky à hauteur de celui qu’elle tenait, il trinqua en faisant tinter les deux verres ensemble. Ces derniers étaient d’ailleurs la seule distance qui séparait le brun de la chanteuse, une proximité soigneusement voulue de sa part. Il souffla alors, soutenant à nouveau son regard dans le sien, un sourire aux lèvres :

« Alors aux supers rencontres. »

Il but un nouveau trait d’alcool, ne bougeant pas pour autant hormis ses iris qui détaillaient longuement les traits de Pearl, s’attardant sur ses gestes et ses lèvres quand elle prit également une gorgée de single malt. Il ne réfléchissait plus vraiment, il se contentait de se laisser porter par l’instant. Peut-être qu’il aurait mieux fait de ne pas venir dans cette maison, de descendre dans ce sous-sol avec elle, d’accepter ce verre de pourtant bon whisky, et peut-être qu’il aurait mieux fait de ne pas faire ce qu’il s’apprêtait à faire, mais il cédait à une envie spontanée... Même si, il avait senti qu’autre chose (quelqu’un ?) l’encourageait à le faire aussi, il se persuadait que ce n’était que lui, et lui seul, qui décidait de passer sa main libre sous la fine mâchoire de la brune, jusqu'à longer son cou, pour finir par saisir ses lèvres avec les siennes et en oublier le reste le temps de ce baiser.

Zack se redressa pour rompre cet instant et regarder la jeune femme dans les yeux, sérieux même si grisé par ce qu’il venait de se passer.

« C’est le moment où tu es supposée dire stop. »

Un léger sourire apparut sur son visage alors qu’il finissait sa phrase. Même si une partie de son esprit tentait encore de le pousser vers elle, il n’allait pas céder à quoi que ce soit sans qu’elle ne l’y autorise. L’autre était loin de gagner cette partie-là, et ce, définitivement.

Un haussement d’épaule avait été la seule réponse du brun au ‘dommage’ de Pearl. Il n’était même pas surpris qu’elle ait ses propres plants et pour tout dire, il n’avait pas l’intention d’en savoir plus, manquant d’intérêt pour le sujet mais aussi parce qu'il préférait rester à l'écart. Non seulement, il ne fumait pas, mais il avait aucun attrait pour ça alors ça n’aurait pas eu de sens qu’il s’éternise.

L’instant d’après, l’atmosphère avait changé. Sans comprendre pourquoi, ça c’était fait soudainement alors que le brun versait du whisky dans leur verre respectif. C’était plutôt surprenant venant de lui... quoiqu’à moitié étant donné que Zack n’était pas du genre à avoir quelconque attache sentimentale ou relation sérieuse depuis bien longtemps. Si quelqu'un l'avait connu en couple, cela l'aurait étonné lui-même. À se demander s’il y accordait de l’attention. Et officiellement, à le voir, non. Honnêtement, lui savait bien, sans vouloir le reconnaître, que c’était le contraire. Simplement, il en taisait consciencieusement la raison, picturant parfaitement un instant T, un événement, une nuit, une personne qui rendait tout le reste dénué de sens et d'intérêt. S’il était honnête avec lui-même, il l’avouerait, mais il préférait se rassurer en disant que cela appartenait au passé, pas vrai ? Alors Zack se contentait de vivre l'immédiat, comme ce soir-là.

Les yeux ancrés sur les lèvres de Pearl qui formaient un sourire, il ne décrochait pas son regard d'elle. A la phrase de cette-dernière il se laissa à son tour attirer dans un baiser. Le dernier geste censé qu’il eut fut d’attraper les deux verres pour les lâcher sur le premier meuble qu’il voyait. L’instant d’après, il n’était plus nécessaire de réfléchir à quoi que ce soit ou de garder quelque forme de retenue, il abandonna même le fait de freiner ce qui pour lui était son subconscient. Peu de questions se posaient sur ce moment-là, c’était sans ambiguïté, sans conséquences, rien qu’eux, dans l’espace brut du présent. Peut-être que ça ne se reproduirait pas, peut-être qu'ils ne se reverraient jamais, mais il n'y aurait pas de regret.